Mimile s'en est allé
Nous étions plus de 15 cyclos du club à avoir fait le déplacement jusqu’à St Antonin-Noble-Val, berceau de sa famille, pour assister au départ pour son dernier voyage d’une figure emblématique de notre association.
Son fils nous a confié son émotion:
« Mon papa doit être content de vous voir si nombreux aujourd’hui. Que vous ayez songé à l’associer à votre 60ème anniversaire, en allant lui rendre visite dans les Pyrénées, me touche beaucoup.»
L’après-midi s’est passé bien vite à évoquer avec sa famille rassemblée les nombreuses anecdotes qui revenaient au souvenir de tous ceux qui l’ont connu.
Son neveu a même conclu : « Vous connaissez notre parent bien mieux que sa propre famille. »
Michel Ponchet a laissé ce commentaire sur notre site: « … les cyclos de l’histoire passent, l’histoire des cyclos reste, pour peu, que ceux d’aujourd’hui s’en souviennent et laissent une trace dans le cheminement de leur vie de cyclotouriste… ».
C’est ce qu’il fait aujourd’hui ainsi qu’Alain Dodé dans les textes publiés ci-dessous.
Roland Mangin
Président de Cahors CycloTourisme
carte "Remerciements" de son Fils
Au revoir, Mimile !
Mimile à pris un nouveau départ, comme il en avait l’habitude, sans prévenir personne. Puisse-t-il vivre son voyage, comme il a vécu ses pérégrinations terrestres ! Avec bonheur, humour et gentillesse.
Cyclotouriste épicurien dans l’âme, il avait sillonné la France dans tous les sens et participé à toutes les manifestations de la FFCT. Simple, jovial, solide, il aimait la vie et faire partager son bonheur de rouler à vélo. Il se contentait de choses simples. À sa manière, il a marqué son époque. Il vivait le cyclotourisme dans la simplicité et l’efficacité. Des grands périples à la simple randonnée, Mimile étonnait par sa bonne humeur, sa gentillesse, mais aussi parfois ses coups de gueule. La vie d’un cyclo en somme !
Emile Vayssière, cyclo cadurcien, n’avait pas froid aux yeux, sans doute parce qu’il était fils de glacier, métier en vogue avant l’apparition des réfrigérateurs. Je l’ai connu à mes débuts cyclotouristes dans les années 70. Mimile était le cyclo que l’on reconnaissait entre tous, avec son large sourire, son vélo qui portait les stygmates de ses voyages. Ses bagages étaient réduits au minimum bien qu’il avait l’équipement d’une randonneuse. L’entretien mécanique n’était pas sa passion.
Ses déplacements, il ne les voyait pas autrement qu’à vélo. Partir à Bordeaux, faire Bordeaux-Paris, puis rentrer à Cahors. Peu importe le temps ! Ses étapes, il les faisait souvent sous des cartons, dans un hall de gare. Mais au réveil, son large sourire prévoyait une bonne journée. Ses randonnées il les faisait seul ou accompagné de cyclos de la même trempe. Ceux du CCI s’en souviennent, Vincent Robichon, Patrick Plaine et les autres. Les grands brevets, les Paris-Brest-Paris, Bordeaux-Sète, il ne les comptait pas. Souvent, il ne pensait pas à s’inscrire. Il disait ainsi : « je l’ai fait en fauvage ! », défaut de prononciation que son appareil dentaire lui imposait.
Dans mes randonnées, lorsque je roulais avec ma fille, il était le premier à ralentir, dire bonjour et demander si nous avions besoin de son aide. Il partageait généreusement ses maigres pitances. Mimile sur son vélo, à vos côtés, c’était le rayon de soleil. Tout allait bien ! Les kilomètres, il ne les comptait pas. Sa voix dépassait souvent celle des autres, et son Président de l’époque, René Molinié de dire : « Mimile n’est pas loin ! Je ne sais d’où il vient et je ne sais pas non plus où il va ! Il est de passage. » En effet, il passait souvent d’une randonnée à une autre, d’un brevet de 300 km à une randonnée dominicale, à peine entrecoupée d’une semaine de vélo que son emploi du temps lui autorisait.
Ayant quelques biens du côté de Font-Romeu, il n’était pas rare qu’il en fasse l’aller et retour à vélo pour encaisser ses loyers. D’un naturel optimiste aucune difficulté ne lui paraissait insurmontable. Solitaire, il éclatait de rire à la rencontre des autres comme pour partager son bonheur et sa joie.
Mimile est parti, toujours jeune, avec ses 86 printemps, son sourire et sans bagages. Il fera son voyage à vélo, de belles rencontres, de longues randonnées et trouvera le bonheur.
Merci Mimile !
Michel Ponchet
Inoubliable Mimile !
« Mimile », « Milou », n'est plus !
Il s'est éteint, paisiblement nous a dit son fils, dans ses chères montagnes dont il gravit tant de cols, par tous les temps, sur sa fameuse bicyclette jaune sans âge, après avoir joué un peu au rugby durant sa jeunesse cadurcienne, et beaucoup mieux au football. Mais il escalada bien d'autres montagnes: Alpes, Vosges, Massif central, et ce rouleur-grimpeur s'élança maintes fois dans les traditionnelles « montées chronométrées » de l'époque, dans notre région : Bruniquel et Pic de Nore.
Véritable dévoreur de bitume, il inscrivit à son palmarès maints Brevets de randonneur des Alpes ou des cols pyrénéens, sans oublier ces chevauchées entre Bayonne et Luchon ou Hendaye et Cerbère : quatorze cols et 700 km au menu !
Mais il commit également quelques exploits sur de longues portions de routes plus plates : Bordeaux-Paris qu'il accomplit en 26 heures et des poussières à l'âge de 53 ans, en une heure de plus à 59; soit dix heures de moins qu'en 1975 lors de sa première tentative !
Mais ce gaillard « Cyclotouriste cadurcien » n'hésitait pas à dormir dans un fossé, à se nourrir de peu, voire à sauter un repas, ce qui lui a valu quelques défaillances « hypoglycémiques ».... le tout assorti d’anecdotes, fausses parfois, véridiques souvent, qui ont enrichi sa légende; celle d'un « Mimile » connu et reconnu dans le petit monde du cyclotourisme lotois, mais aussi, bien au-delà de nos frontières régionales, par les nombreux cadurciens qui l'avaient côtoyé également au « Périé », à deux pas du Pont Valentré, lorsqu'il fabriquait ses pains de glace pour poissonniers, charcutiers, restaurateurs et autres bouchers.
Il y a aussi tous ceux qui n'ont pas oublié sa chevauchée aventureuse sur sa petite reine fatiguée, jusqu'à Twickenham, pour assister au match international des fameux rugbymen cadurciens Alfred Roques (le « pépé du Quercy ») et Momméja, ni son départ pour une finale nationale de Jeu à XIII, des épopées qui lui valurent avec ses autres « performances » plusieurs articles dans la presse locale.
A cela s'ajoutent les récits épiques de ses départs à solex (sans moteur!) à Montauban, ses brusques envies d'enfourcher son vélo bien loin des canons actuels pour aller se régénérer dans une source chaude pyrénéenne (plus de 300 km !).
Enfin, comment oublier sa faconde, sa joie de vivre communicative, ses blagues ou ses devinettes toujours à la bouche, ou, pour ma part, cet accent du sud-ouest qui m'avait séduit dans ma jeunesse normande en écoutant Roger Couderc commenter un match de rugby dont je ne connaissais par encore les règles.
Dommage que l'écrivain Antoine Blondin, auteur également de plus de cinq cents magnifiques chroniques sur le Tour de France dans le journal L'Équipe, ne l'ait pas connu ! Il l'aurait inscrit, j'en suis sûr, dans sa légende des cycles!
Alain Dodé