Elle nous a fait l'honneur de participer à notre brevet de 600 km...elle nous raconte son Paris-Brest-Paris

Publié le par Cahors CycloTourisme

Suzanne L-P de l'Amicale Cyclo Breuilloise n'a pas hésité à descendre de la région parisienne pour participer au Brevet Randonneur mondial de 600 km de Cahors Cyclotourisme, et ainsi valider son "ticket' pour participer au Paris-Brest-Paris 2023. Pour nous remercier, elle nous a transmis son vécu durant les 90 h passées sur son vélo (et un peu avant) pour valider son challenge, ce qui est un véritable exploit.

Le texte est un peu long, mais c'est tellement raconté avec humour que l'on prend plaisir à vivre avec elle son PBP.

Texte : Suzanne L-P.

DIAPORAMA Suzanne L-P.

Photos pour illustrer l'article :  Participants amis Philippe D., Bernard A.

La randonnée-course Paris Brest Paris un rêve réalisé.
J'ai du plaisir à rouler seule ou accompagnée et découvrir ces beaux rubans de routes de campagne en France. Je réalise fin 2022 que PBP est portée de mes roues. Merci Patrice, je m'accrocherai à ta croyance en moi.
Samedi, gare de Rambouillet direction la Bergerie. Elle est plus éloignée que ma lecture du plan m'a laissé croire et je n'ai pas mis de chaussettes : j'ai les orteils qui s'échauffent : pour le retour j'enlève mes chaussures ou je fais du stop ? Je ne veux pas commencer avec un handicap ! Déjà je fredonne "It's a long way to Tipperary" a song of a irish man emigrated to england" me revient en tête. Ma maman la chantait. Ma maman aimait le vélo, les rencontres internationales. Je suis impressionnée par toutes

les nationalités  présentes pour retirer le paquetage. Oui, il s'agit bien d'un évènement international. Dans le sac il y a la plaque pucée, le maillot du PBP 2023 et ce gilet jaune “Paris Brest Paris” qui m'impressionne tant quand je croise des cyclos qui le portent. Marjorie, maman d'un randonneur se fait un plaisir de me raccompagner à la gare : un ange passe, nous avons au moins une effluve de parfum en commun. Echange de n° de téléphone.
Le lendemain, dimanche, dès la gare de l'Est, je retrouve un cyclo d'Indonésie "plaqué PBP".

 

J'aurai fonction de guide jusqu'à Rambouillet pour de nombreux cyclos. Les étrangers, italiens, brésiliens, japonais, américains ... sont perdus face à la vente de billets pour Rambouillet : les trains rapides TER partent de l'étage, les billets se prennent au niveau inférieur banlieue RER. Peu compréhensible pour un néophyte. Le TER est rempli de cyclos. Je veux prendre une photo mais ...je n'ai plus de téléphone. Je renonce au PBP ou je pars sans téléphone, sans carte bleue, sans la liasse de billets de 5e ? Je contacte Marcus et lui laisse tout gérer ? Un cyclo me dit qu'il a entendu causer d'un téléphone perdu sur le quai. Cavalcade des jambes et cavalcade d'espoir aux objets trouvés puis à l'accueil. Mr

Bonnaventure (véridique) a trouvé mon téléphone et a tout fait parfaitement pour que je le retrouve y compris de téléphoner à Marcus mon mari. Surtout ne rien projeter de négatif à partir de ces minutes intenses. Dans le train, je rencontre Chermine de Los Angeles qui m'embrasse comme du bon pain et que je retrouverai sur le parcours.
A Rambouillet il me faut retrouver mon sas “S”. Je retrouve Jean Luc, mon compagnon de route du brevet 600 à Cahors, il est dans un sas précèdent. Il est très rassurant pour moi car plein de sagesse et d'expérience. Les moutons-cyclos du sas S se dirigent vers le point de vérification des lumières avant et arrière et de la présence du gilet. Puis les cyclos-moutons

se dirigent vers la ligne de départ sous la voix de l'animateur.

C'est parti ! La nuit nous rattrape. Il y a les cyclistes qui ontl'habitude de rouler à droite et ceux qui n'ont pas la même vision : ils roulent sur la gauche de la voie de droite. 1ière leçon : il va falloir de méfier des réflexes de ceux qui ont l'habitude de rouler à gauche : britanniques, indiens, japonais ... Je roule avec un groupe

qui se plante de route : 2 ième leçon : vérifier souvent son

GPS. Heu ... oui, mon lièvre cette leçon est censée être déjà acquise ! Premier stand tenu par une association qui nous ravitaille en eau. Ils nous promettent de la soupe au retour : Chouette, je m'y vois déjà ! L'arrêt au premier point de contrôle donne une très bonne image des bénévoles : ils sont aux petits soins pour nous diriger. Soupes, carottes rapées, bananes, pêches, plats, grillades. Suis rassurée même si j'en ai plein les poches : noisettes, amandes, pruneaux, barres, et une quinzaine de portion de poudre magique minéraux et/ou énergie. J'attache ou pas mon vélo aux point de contrôle ? Il s'agit de ne pas perdre la clef de l'antivol ! Moi, si je souhaitais avoir un vélo à l'oeil, je me déguiserais en cyclo: le choix est extraordinaire. En effet, un marseillais sera délesté de sa monture avec les clefs de voiture. Vaut mieux des fois faire pitié qu' envie. Marjorie (rencontre à

Rambouillet la veille du départ) qui me suivait en direct,

m'attend à une étape, disponible à mes besoins : Que du bonheur. Vincent m'a t-il parlé de sa boule qui grossissait ?
Soit, j'étais déjà tellement recentrée sur ma petite personne que j'ai oublié, soit Vincent a eu la délicatesse de ne pas mettre en avant sa difficulté. Les filles du Perreux, avec qui j'ai roulé au BRM 400, Pascale et Carole sont en retard sur le planning qu'a établi Carole. J'hésite à rouler avec elles, mais je commence à ressentir la fatigue et donc moins disponible aux autres, à tous ces cyclos
autour de moi. Vivant des situations nouvelles pour moi, tout me demande beaucoup d'énergie :comprendre l'autre, me positionner par rapport à l'autre. Aussi je parle peu. Je loupe beaucoup de contact exceptionnels. Je suis concentrée sur mes besoins : savoir quand dormir, me laver, laver les
cuissards, bien remplir mes poches (y compris avec des pommes de terre Michel), avoir le maximum d'autonomie en récupérant de l'énergie pour le GPS, nettoyer les galets et la chaîne.
J'éteins le téléphone entre 2 pauses aussi je loupe beaucoup de belles photos : des dizaines de cyclos
endormis disséminés sur les bords de route à coté de leur monture mais surtout les asiatiques qui dorment assis , tête penchée en avant sur le bas coté mais tellement à la limite de la chaussée que je me demande quelle valeur ils accordent à leur vie d'être humain. Je fais honneur à toutes ces personnes qui ont installé une table de ravitaillement. Même si je ne m'arrête pas à toutes, je les remercie : ils nous sont tellement précieux moralement et "nutritivement". Certains nous installent des couvertures pour dormir. Il y aussi des associations, des municipalités qui nous permettent de boire et manger “free” ou payant ou avec cagnotte. Tout monde s'interpelle en anglais. Un quart de français seulement, un autre quart d'européens. "Where are you come from ? " . On y trouve de drôles de vélos : carénés, mini-vélos, pignon fixe, vélos couchés et un en bambou.

Venus de Malaysie

 

Entrevu la mer vite fait : pas de trempette ni d'arrêt ; je roule tant que je n'ai pas besoin de pause obligatoire. C'est drôle de passer si vite comme sur une autoroute. Bon, faut s'y contraindre, sinon tu ne t'inscris pas à cette randonnée mythique et mondiale.
Mercredi après midi il fait chaud, nous roulons vers l'est et bénéficions d'une maigre ombre des arbres. Vivement l'ombre suivante. Et j'avance comme ça en visant le prochain soulagement. "It's along way to Tipperary, it's a long way". Allez Suzanne encore 28 km jusqu'au prochain arrêt. Juste 2 aller retour Floirac-Vayrac. Tu peux ! Je ne regarde que ce qu'il reste à faire jusqu'à la prochaine étape. Un petit coin de paradis : un contrôle, un bistrot ou épicerie d'un village, un bon morceau de plat ou de descente. Je commence à avoir le besoin de rouler en groupe pour bénéficier de leur énergie et retrouver l'espoir de finir. Une chouette nana puis un gars super sont vigilent à ce que je suive derrière. Moi aussi je tirerai du monde la nuit. Mon genou droit me rappelle qu'il s'agit de ne pas regretter de mauvaises conséquences ultérieures. Allez Suzanne, actionne l'autre jambe mais juste les

ischios car le genou gauche n'apprécie plus vraiment cette ritournelle qui n'en fini plus. Suzanne découvre que si elle a mal à l'extérieur, elle doit tourner son pied à l'extérieur. Ca fonctionne. Et inversement aussi. Extra ! Fière d'elle ! Mais il s'agit surtout de rester tranquille les montées. A la mode Pascal, raisonnable.
J'ai dormi 3 fois. La 1 ière fois j'ai du patienter 30/45 minutes avant de m'endormir et j'ai été reveillée par le froid.  ième fois gros dodo au milieu d'un gymnase là ou c'était le moins sale. La 3 ième fois sur un matelas et après qu'une bénévole m'ait réveillée à l'heure convenue, je me suis rendormie. " Il est 4 h , on ferme"! Oups ! Un bien pour un mal car un gars au petit "déj" m'a donné une crème miracle qui m'a soulagée mémorablement le périnée.

 

Le temps n'en fini plus de s'allonger, un ruban qui n'en fini pas comme dans les contes" et ils vécurent heureux de longues années ..." Merveilleuse surprise à 42 kms de l'arrivée : Luc ! Moi, envie d'une belle embrassade. Lui "Allez, c'est pas le moment !" Du Luc, quoi ! Il me propose une salade, des morceaux de mangue, un croissant, toute son énergie et de la rigolade. Me revoici re-booustée, comme un mulet avec une carotte en vu. Moi qui redoutais ces derniers kilomètres infinis.
Je grille pas mal de cyclos, j'arrive avec la pêche. Un coup de cachet, une médaille, Marcus est là, une douche et pendant ce temps d'autres cyclos continuent d'arriver. Et je n'ai pas perdue ma dent-pivot qui s'est sauvée quand j'ai croqué dans une carotte : vraiment trop forte la Suzanne !
août 2023. Suzanne L- P. A.C.Breuilloise.

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